La recherche fondamentale, plus largement, soulève de plus en plus de questions ces dernières années. À quoi bon ? Pourquoi investir tant dans ces recherches ? La science se doit-elle de se justifier à priori ? “On ne peut pas arrêter la recherche fondamentale, coupe Stéphanie Beauceron. Cela reviendrait à arrêter la société.”
A l’en croire, ces gigantesques programmes permettent plus largement de mener, en périphérie, d’autres expériences. La hadronthérapie, une technique d’irradiation pour soigner certains cancers, a été découverte grâce à la physique des particules.
Les cellules cancéreuses sont bombardées de manière très précise via des technologies similaires au LHC ou au FCC.
Sur un autre aspect technique, les détecteurs du LHC ont permis de développer des cristaux absorbant fortement les radiations. Ces derniers sont désormais utilisés dans l’imagerie médicale pour réduire la taille des machines. Le CERN sert également de testeur pour les industriels d’électronique. Le centre reçoit les cartes mères et les processeurs avant leur mise sur le marché.
Lors de la découverte de l’électron, Thomson ne pouvait pas imaginer qu’il serait aussi important dans la société. Mais sans l’électron, pas de téléphone, pas d’ordinateur. L’utilité des découvertes en science fondamentale n’apparaît donc pas directement…
Dans un monde idéal, toute recherche pourrait se tenir sans contraintes. “Mais il faut faire un choix, avertit Laurent Husson, membre de Scientifique en rébellion. Ça serait bien de décider de l’orientation scientifique en présence de la population.” Les dépenses de la recherche se décident dans les hautes sphères politiques. Ce qui, selon le chercheur, entraîne parfois des financements aux faibles retombées scientifiques.
L’exploration martienne, par exemple, donne peu de résultats. Mais elle est susceptible de donner davantage de pouvoir politique et militaire à un pays. En Europe, le lancement d’Ariane 6, le 6 mars dernier, a donné lieu à la mise en orbite d’un satellite de reconnaissance militaire.
Le FCC, lui, semble à la croisée des chemins. L’Allemagne s’est dite défavorable à la tenue du projet en mai 2024. Le gouvernement germanique pèse pour plus d’un quart des financements du centre de recherche européen.
Le FCC connaîtra-t-il un scénario semblable à celui du collisionneur linéaire international (ILC) ? Ce grand projet aurait dû voir le jour au Japon. En 2019, après quinze ans de doute, le gouvernement nippon annonce qu’il n’est pas prêt à accueillir le projet. Il reste, aujourd’hui, en pause. En attendant, la Chine rôde. Pékin a annoncé un projet similaire au FCC, à la différence qu’il devrait démarrer les expériences… dix ans plus tôt.